Tous les athlètes en rêvent : prédire l'avenir des performances optimales qu'ils pourraient atteindre
Le problème majeur réside dans une différence semblable à celle entre l'astrologie et l'astronomie.
Bien que ces deux domaines puissent sembler similaires, ils ne le sont pas.
Les sciences du sport, comme leur nom l'indique, sont une science, comparable à l'astronomie, tandis que l'astrologie est un art divinatoire.
Sans prétendre atteindre le rang de la divination, dont la science reste éloignée, nous disposons, grâce aux sciences du sport, de méthodologies robustes.
Mais les sciences du sport ne font pas de prédictions.
Tout au plus, et avec une grande humilité, elles émettent des hypothèses auxquelles elles peuvent associer un taux de probabilité .
Celles-ci permettent, par l'analyse spécifique des leviers de performance monitorés lors d'un profilage physiologique, de modéliser les améliorations "potentielles" d'un athlète.
Dans cet article, nous allons étudier le cas d'un jeune athlète cycliste professionel de 22 ans à travers son profilage physiologique.
A travers ce dernier, nous pourrons émettre de hypothèses sur les "potentielles évolutions possibles" en fonction des réactions physiologiques spécifiques de ses systèmes de performance, mais aussi eu égard aux valeurs normatives de ces derniers.
Observation du profilage physiologique
Il fut effectué lors d'un test triangulaire par pallier de 2' incrémentés de 50w jusqua'au VT1, puis des palliers de 25w jusqu'à l'arrêt de l'effort

On observe tout d'abord une assez bonne capacité de consommation maximale d'oxygène ce qui le place plutôt dans le 1/3 supérieur des valeurs détectées dans son sport
Ce n'est un gage de performance dans l'absolu, mais un pré-requis !
Néanmoins, à partir de niveau de Vo2 Max, on peut considérer que le potentiel de l'athlète à performer à haut niveau est important .
Pour nuancer ce 1er constat, on peut sans aller plus loin, se questionner sur l'efficience de son système ventilatoire avec un volume courant (Tv) de 3,3 L seulement et un volume total (Ve) de 183 L pour une fréquence ventilatoire (Rf) de 56 ppm
Meme sans chercher plus loin dans l'analyse, l'expérience nous permet de détecter une limitation dans ce système de performance ci.
Car avec ces seules données ci, on ne peut pas émettre d'autres hypothèses le concernant
Nous allons ajouter maintenant les seuils ventilatoires

Vt1:
59% de Vo2 max
60% de puissance Vo2 max
80% de Hr Vo2 max
76% de Hr max
Vt2:
86,8% de Vo2 max
87% de puissance Vo2 max
94% de Hr Vo2 max
91% de Hr max

Grace à ce nouvelles données, et avec l'expérience de plusieurs dizaines d'athlètes issu de ce sport, nous pouvons déja affiner notre analyse
Son VT1 à 59% de Vo2 nous indique qu'il y a certainement un sujet sur le développement mitochondrial car on pourrait et devrait avoir des valeurs un peu supérieures pour compétiter au plus haut niveau mondial
Le VT2 par contre est dans une fourchette assez haute de ce que l'on rencontre aussi....
Si nous n'allions pas plus loin, on pourrait dire qu'une prescription d'un volume supérieur à des intensités controlées pourraient etre un facteur de développement pertinent
Maintenant intéressons nous à l'un des tests les plus importants qui sont réalisés lors d'un profilage physiologique, à savoir les 2 tests de spirométrie pour déterminer la capacités inspiratoire et expiratoire de l'athlète

Nous avons ici, un résumé de la fonction ventilation
(Il y a dans le rapport du profilage un descriptif beaucoup plus complet et vaste de la cinétique de chacun des 2 aspects de son système ventilatoire)
Grace à ce récapitulatif nous avons 2 infirmations
Son volume courant idéal sous Vt2 et au dessus
Sa puissance expiratoire et inspiratoire ainsi que sa force et son débit
Il n'en faut pas plus pour confirmer l'hypothèse initiale sur la limitation ventilatoire et les perspectives d'évolutions envisageables après un long protocole spécifique d'entrainement ventilatoire dédié .
Cette observation est dite statique, opposée donc à celle dite "dynamique" qui correspond à la réaction et la cinétique de la réponse ventilatoire à travers le test triangulaire;
Ceci nous renseignera encore plus sur la façon dont l'athlète à pu, ou pas, utiliser ses capacités actuelles, sans parler de celles qu'il pourraient obtenir avec l'entrainement énoncé ci-dessus

Sur le tableau de gauche on voit rapidement, par domaine d'intensité, ou se situe la capacité ventilatoire durant le test et celle qu'il aurait dû avoir avec les données de spirométries enregistrées

Cela signifie a minima 2 choses:
Il n'exploite pas ses capacités ventilatoires actuelles
Il a donc une double progression a attendre:
Se rapprocher dans un 1er temps de son volume courant idéal.
En suivant des protocoles spécifiques d'entrainement ventilatoire, par une meilleure conscientisation, coordination et mobilisation mais aussi endurance et puissance des muscles venitlatoires, il ameliorera l'ensemble de sa capacité ventilatoire initiale ce qui augmentera mécaniquement son volume courant idéal
Il pourra attendre 3 effets de ces manipulations permettant ces adaptations physiologiques au niveau de son système ventilatoire à savoir:
Amelioration de l'extraction de l'oxygène musculaire qui décalera de la potentialisation de l'effet Bohr grace à la baisse de la fréquence ventilatoire (Tv)
Quand le volume courant augmente, la fréquence ventilatoire baisse pour un volume total (Ve) donné
Baisse du cout énergétique ventilatoire généré par la baisse de la Rf (réflexe métabolique ventilatoire et cout énergétique documenté ici)
Baisse de la perception d'effort pour une puissance donnée (corrélation entre la Rf et le RPE)
Les améliorations chiffrée de cette approche globale devrait se traduire sur l'overview initial par
Une augmentation de la puissance produite par unité de consommation d'oxygène
Une légère augmentation de la Vo2 max
L'analyse peut-etre encore plus poussée

On ne va égrainer dans cet article une à une les choses qu'on peut tirer de ce profilage physiologique (cela a été fait ici pour un autre exemple), cependant nous allons nous attarder sur un point très précis
En préambule, nous avions indiqué un glissement entre les pourcentages des valeurs de seuils ventilatoires exprimés en fonction de consommation maximale d'oxygène comparé aux valeurs normatives habituellement relevées chez ce type d'athlète.
Il s'agissait plus précisément du seuil ventilatoire 1 (VT1), pour lequel il pouvait apparaitre un léger déficit probable au niveau de la densité mitchondriale et/ou d'un déficit enzymatique de la citrate synthase liée à l'efficacité énergétique aérobie.
Si on observe les valeurs de la fraction d'oxygène dans l'air expiré (FeO2), on s'apercoit que ces valeurs sont assez hautes malgré tout pour un athlète de ce niveau.
Cela vient valider de facon quasi certaine l'hypothèse émise initialement ou l'un des facteur de développemnt serait une accumulation de volume à des intensités spécifiques
Pour autant, ce "déficit" apparait comme "normal" pour un athlète d'endurance encore très jeune avec un passif dans le cyclisme tout récent .
Conclusion:
Bien que l'analyse présentée dans cet article ne soit pas exhaustive, elle permet déjà de saisir l'approche globale.
Il s'agit d'identifier les facteurs limitants et de tenter de quantifier leur importance, soit par analogie avec des athlètes du même sport, ayant un profil et un âge similaire, soit en fonction du pourcentage des valeurs normatives par rapport à ses propres capacités.
À la question de savoir combien de watts ou quelle VO2 max cet athlète pourrait atteindre dans une "version théorique améliorée" de lui-même.
Au risque de vous décevoir, nous ne fournirons pas de chiffres pour au moins deux raisons:
La première, c'est que nous n'en avons pas connaissance
La seconde, c'est que déterminer un chiffre reviendrait à fixer une limite, et notre travail quotidien consiste précisément à repousser ces limites.
Néanmoins, si l'athlète s'engage dans le travail ventilatoire et le suivi qui lui sont proposés, il devrait observer des améliorations significatives.
La réduction du coût énergétique du réflexe métabolique ventilatoire permettra de gagner quelques watts.
À cela s'ajoute une meilleure extraction de l'oxygène musculaire grâce à la diminution de la fréquence respiratoire (Rf) et à la potentialisation de l'effet Bohr, ce qui devrait également améliorer son rendement et probablement augmenter légèrement sa VO2 max.
Le travail sur la stratégie ventilatoire lui offrira également une meilleure réponse à l'effort, en réduisant la perception de l'effort (RPE) et en lui permettant de mieux gérer la variabilité des efforts dans son sport, tout en optimisant ses entraînements en limitant l'écart entre la charge externe réalisée et la charge interne mesurée.
Le travail de volume supplémentaire à intensité spécifique lui permettra une meilleure efficience métabolique globale et également une réduction du coût énergétique pendant les moments plus "calmes" d'une course (qui sont tout de même plus nombreux que les moments intenses) grâce à une utilisation optimisée des substrats énergétiques, avec une augmentation de l'énergie produite à son seuil ventilatoire 1.
Ce dernier point étant largement documenté.
Vous l'aurez compris, le profilage physiologique n'a pas pour but de prédire les évolutions possibles de performance d'un athlète, même s'il fournit des lignes directrices.
Le profilage physiologique vise à identifier les leviers de performance et les facteurs limitants à l'effort.
Il nous sert à orienter l'athlète et son équipe vers des axes de développement et à prescrire des protocoles d'entraînement spécifiques.
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